Campagne électorale

Boue abondante, vedettes sous-utilisées et… un phénomène nommé Gertrude

Par Pierre Gince, PRP, ARP, FSCRP   |   28 septembre 2018

De toute évidence, la campagne électorale qui se terminera lundi n’a pas répondu aux attentes à la fois élevées et précises des électeurs. Quel paradoxe… alors que jamais jusqu’à maintenant, les partis politiques n’ont eu en main autant d’outils pour connaître les intérêts des Québécois et mesurer leurs réactions !

Quelles leçons de communication peut-on tirer ? Il y en a au moins trois, et elles s’appliquent à toutes les décisions de gestion et de communication que l’on peut prendre au quotidien :

1) Propreté promise, boue livrée

Les voeux pieux ont été nombreux en début de campagne : « Ce sera une campagne propre, sans attaques personnelles », scandaient les chefs des quatre grands principaux partis. Or, trois d’entre eux ont rapidement oublié leurs belles promesses…

Les anglophones ont une très belle expressions : « Promise less, deliver more ». Et il serait approprié de la compléter avec ceci : « And be consequent with your intentions ».

Les chefs des quatre principaux partis ont beaucoup fait parler d’eux durant cette campagne. Loin derrière au départ, Manon Massé a connu une montée impressionnante à la suite du débat en anglais.
Sans surprise, le premier ministre sortant, Philippe Couillard, et son principal challenger selon les sondages, François Legault, ont obtenu un volume de couverture semblable. Le chef du PQ, Jean-François Lisée, suit d’assez près alors que Manon Massé ferme la marche.

2) À quoi bon recruter des vedettes ?

C’est toujours la même chose : quelques mois avant le déclenchement des élections – même lorsqu’elles l’ont été, comme ce fut le cas avec l’arrivée tardive de Christian Dubé et de Louis Lemieux, tous deux à la CAQ – les partis politiques rivalisent de fierté à recruter telle ou telle personnalité. Une démonstration de force, prétendent-ils.

Or, c’est à croire qu’une fois qu’ils ont dit oui, on leur réserve des rôles plus que réservés. Dans les points de presse, les partis les positionnent souvent comme des « plantes vertes » à côté du chef et hop ! on ne les voit plus et on ne les entend plus…

À part lors d’un débat portant sur l’économie, les principaux candidats au profil économique ont peu fait parler d’eux…
… Et les candidats vedettes du secteurs de la santé n’ont pas été davantage mis en vedette… Sauf Gertrude Bourdon, avec sa tonitruante entrée en scène !
Comparaison PLQ vs CAQ : l’arrivée de Gertrude Bourdon en politique a coïncidé avec un retrait calculé du Dr Gaétan Barrette et une déclaration du candidat caquiste Ian Lafrenière. Sinon, la campagne des vedettes ressemble plutôt à un bruit de fond.
Comparaison PQ vs QS : seul Gabriel Nadeau-Dubois a attiré l’attention des projecteurs pour sa formation politique. Du côté du PQ, les vedettes Véronique Hivon et Jean-Martin Aussant étaient dans l’ombre de la controverse Michelle Blanc…
Dans les médias sociaux, Manon Massé et Gabriel Nadeau-Dubois ont éclipsé leurs trois rivaux en ce qui a trait à l’engagement sur Facebook.

3) Gertrude Bourdon : un déficit de réputation historique !

Qu’est-ce qui n’a pas encore été dit sur l’ex grande patronne du CHU de Québec-Université Laval ?

Après des sessions de magasinage au PQ et à la CAQ, Mme Bourdon a joint les rangs du PLQ en affirmant au micro d’Alain Gravel, à ICI Radio-Canada Première : « Je savais que mon saut en politique allait marquer l’histoire. »

Depuis le 18 août, Gertrude Bourdon a généré un déficit de réputation de plus de 700 000 $.

Son souhait est largement atteint : du 18 août au 26 septembre 2018, son déficit de réputation a franchi le cap des 700 000 $. Cette somme provient des 4 933 retombées de presse qui sont liées à ses convictions politiques, à un contrat attribué sans appel d’offre sous sa direction au CHU et aux souhaits d’anniversaire réalisés ces derniers jours. C’est du jamais-vu dans l’histoire politique au Québec. Et, malgré tout, elle reste dans la course dans Jean-Lesage.

Toutefois, Mme Bourdon aurait tout intérêt à tenter de renverser la vapeur – une remontée positive à la fois – dès le 2 octobre, et ce à partir d’une stratégie réfléchie. Mais, aura-t-elle assez d’une vie pour y parvenir ?