Analyse de presse : vive l’indépendance !
Tout récemment, j’ai eu le privilège de collaborer au « PR Measurement Guidebook », publié aux États-Unis par l’éditeur PR News Press. Voici de larges extraits de mon article (2e de 2 parties).
Plus loin dans ce texte, je mettrai l’accent sur l’importance de l’indépendance d’esprit – ou objectivité – au moment d’analyser des retombées de presse.
Mais d’abord, une très longue question : « Doit-on investir en analyse de presse alors que nous avons énormément investi en temps, en honoraires et en frais de toutes sortes pour obtenir des retombées de presse et que mon expérience me dit que nous avons eu d’excellents résultats ? ».
Et voici ma courte réponse : « Oui. Assurément ! ».
Plus que jamais dans les années 2010 :
- quelle organisation privée ou publique peut se permettre « le luxe » – parce que c’en est un – de « dépenser sans compter » ? Aucune. Mais… « investir » afin de mesurer le retour sur investissement et le retour sur réputation, c’est autre chose ;
- les communicateurs – ceux qui travaillent au sein des organisations tout comme ceux des cabinets – doivent continuellement justifier leur travail, dont les résultats souvent intangibles, tout comme leurs budgets. En relations publiques, tout ne se mesure pas avec précision… mais les relations de presse, oui ! ;
- sans outils de mesure, quels solides arguments le communicateur aura-t-il en main pour faire valoir les véritables performances (brutes et nuancées) d’une opération de presse ? Que celle-ci ait visé à générer d’importantes retombées positives, ou… à « limiter les dégâts » dans un enjeu non souhaité, la démarche est la même : il est important de mesurer. Et ce, tant pour rassurer les communicateurs que le président, le V-P finance, les partenaires, etc. (outil de gestion et de rayonnement) ;
- les dirigeants d’organisations publiques et privées savent de plus en plus qu’il existe des outils qui génèrent des analyses de performance de nature quantitative et qualitative pour tout ce qui a trait aux relations de presse. Et ce, à des coûts très abordables ! Lorsqu’ils acceptent de tels déboursés ou qu’ils les exigent, c’est une preuve qu’ils croient en la valeur ajoutée des relations de presse ;
- des liens se font naturellement entre les différentes spécialités. Ainsi, il est de plus en plus reconnu qu’un investissement en commandite aura un impact significatif dans la mesure où, au-delà de l’achat, cette commandite sera exploitée. Dans le même esprit, il est de plus en plus naturel qu’une analyse de presse (souvent réalisée pour quelques milliers de dollars…) vienne conclure tout le travail lié à une opération de relations de presse qui se sera échelonnée sur quelques semaines ou mois.
Équivalence publicitaire ? Effet multiplicateur ?
Plusieurs outils ont recours à l’équivalence de la valeur publicitaire (« Advertising Value Equivalents », ou AVE) afin de mesurer la valeur économique des retombées de presse.
Par exemple : si l’espace consacré à une retombée coûte 10 000 $ pour un placement publicitaire dans Les Affaires, le Los Angeles Times ou à PBS, ce montant est pris en considération.
Toutefois, il faut absolument éviter de simplifier et d’effectuer un calcul avec un effet multiplicateur (par exemple : attribuer 5 ou 10 fois la valeur publicitaire à toute retombée, peu importe son contenu)… Parce que, sur cette base, faire la « une » du USA Today aurait la même valeur positive, que l’on s’appelle Céline Dion et Bernard Madoff !
Lorsque intégrée à un choc mathématique raffiné, l’équivalence de la valeur publicitaire permet de générer une valeur économique précise (en dollars et en pourcentage). Celle-ci donne notamment aux dirigeants des organisations un même portrait clair d’une situation, à savoir si telle ou telle stratégie de communication (une entrevue accordée ou une opération de relations de presse concertée) a eu l’impact souhaité et, si oui, de quel ordre.
« Il faut absolument éviter de calculer avec un effet multiplicateur. Sinon, faire la « une » du USA Today aurait la même valeur pour Céline Dion et Bernard Madoff… »
Un élément clé : l’objectivité
Que ce soit à Londres, New-York, Paris, Beijing ou Montréal, les spécialistes de l’analyse de presse utilisent les mêmes variables : titre, amorce, visuel, mentions de l’organisation et de ses marques, légende, mortaise, etc. Selon les mandats, jusqu’à 25 variables sont utilisées !
Hélas, un élément de base important est rarement considéré : l’objectivité.
Afin d’économiser le coût nécessaire à une analyse de presse réalisée par une firme indépendante – ou dans le but de s’assurer d’obtenir le résultat souhaité ! – les communicateurs mesurent trop souvent eux-mêmes l’impact de leurs propres retombées de presse.
Que devient alors l’objectivité… alors qu’il est question de leurs projets ou de leur patron ? Portent-ils parfois des lunettes roses devant certaines situations délicates ? Et comment traitent-ils les failles qui, pourtant, sauteraient aux yeux d’un analyste indépendant ?
« Les communicateurs mesurent trop souvent eux-mêmes, l’impact de leurs propres retombées de presse. Que devient alors l’objectivité, alors qu’il est question de leurs projets ou de leur patron ? »
Qui trop embrasse…
Le vieux dicton « Qui trop embrasse mal étreint » convient très bien à l’analyse de presse parce que l’on peut facilement se perdre à vouloir analyser toutes les retombées qui portent sur une organisation ou un enjeu.
Quoi faire ? C’est simple : il faut cibler ! C’est-à-dire :
- circonscrire ce qu’il est souhaitable d’analyser, soit la période et un aspect très précis (comme s’il s’agissait d’analyser une seule facette d’un ballon de soccer, et non tenter de tout couvrir…)
- obtenir le nombre de retombées de presse par catégorie de média (radio, télévision, quotidiens, hebdomadaires, magazines et médias en ligne) pour la période circonscrite ;
- faire des croisements quantitatifs selon la période (mois, jour), le média, de même que les titres et les amorces (favorables, neutres ou défavorables) ;
- procéder à une analyse qualitative en isolant un enjeu ou, encore plus précisément, un angle spécifique à l’intérieur d’un enjeu (ex : dans le dossier de l’exploitation du gaz de schiste, il pourrait être utile à un intervenant – qu’il soit pour ou contre – d’analyser tout ce qui a été écrit dans les quotidiens et les magazines, au cours des deux années précédentes, à propos d’un moratoire obtenu ou demandé dans trois États). Ainsi, à travers plusieurs milliers de retombées où une chatte y perdrait ses chatons… il est possible d’avoir un portrait clair !
Quatre éléments à retenir
Que doit-on retenir à propos de l’analyse de presse ? Principalement quatre éléments :
- chaque retombée provenant des médias traditionnels (radio, télévision, quotidiens, hebdomadaires et magazines) peut être analysée sérieusement, de façon sommaire ou très précise, en fonction des objectifs et des besoins de l’organisation
- si les outils d’analyse utilisés pour les médias traditionnels sont souvent sophistiqués, la situation est encore bien différente en ce qui a trait aux médias qui se trouvent sur le web (puisque ce segment est aussi nouveau qu’en évolution)
- la sophistication d’outils d’analyse a contribué à faire émerger une « culture d’analyse de presse » au sein des organisations et des cabinets de relations publiques, ce qui a un impact assurément positif au sein de l’industrie des relations publiques
- parce qu’ils servent à la fois à la gestion et au rayonnement, les outils d’analyse de presse et l’analyse rigoureuse qui en découle contribuent assurément à la qualité des organisations.
P.S. N’ayant pas trouvé une façon idéale d’illustrer l’indépendance en analyse de presse, je me permets de faire un clin d’œil au Général Charles de Gaulle…