Bonhomme : gagnant sur toute la ligne !
Peut-on se relever lorsque le ciel nous tombe sur la tête ? Oui. Et l’unique Bonhomme Carnaval en est une preuve bien vivante !
Vendredi 24 septembre 2010, fin de matinée. Dans mon auto, j’écoute une Christiane Charrette catastrophée par ce que le magazine Maclean’s vient de faire à Bonhomme.
Quel Québécois n’a pas vu l’icône du Carnaval de Québec, une valise à la main qui déborde de billets de banque ? Et que dire du titre sans équivoque : Quebec: The most corrupt province.
Bonhomme et la corruption : où est le lien ? Il n’y en a pas plus que lorsque, en 2008, la magazine français Paris Match a consacré sa « une » au 400e du Québec (sic), mettant notamment en vedette le sherbrookois Garou… Décidément, quand nos cousins et nos voisins parlent de nous, il y a souvent confusion !
Le site du Maclean’s misait évidemment sur sa « une » pour mousser les ventes de sa version papier – tant au Canada où c’est un magazine phare qui est néanmoins en perte de vitesse, qu’au Québec où il tente de se démarquer.
Chose certaine : pour se démarquer, ce fut parfaitement réussi : les copies sont disparues des kiosques à une vitesse folle et jamais les Québécois n’ont-ils autant entendu parler de ce magazine… Au sein de la grande famille de Rogers, même le cousin canadien-français d’Amérique du nord, L’Actualité, a répliqué à ce dossier… en prenant la défense de Bonhomme !
Chronologie d’une crise
Qu’est-ce qu’a fait la direction du Carnaval de Québec ? Exactement ce qu’il faut faire en situation de crise :
- Comprendre la situation (distinguer les faits et les impressions, et mettre le plus possible les émotions de côté)
- S’appuyer sur une stratégie déjà prévue pour la situation précise ou une semblable
- Désigner un (des) porte-parole expérimentés
- Communiquer rapidement un message clair et pertinent aux publics visés, selon une certaine séquence
- Mesurer rapidement et régulièrement l’impact des communications
- S’ajuster au besoin
- Reprendre l’offensive dès que possible
Ce jour-là, à 12 h 30, je reçois un appel. « Salut Pierre, c’est Jean Pelletier au Carnaval. As-tu vu le Maclean’s ? Peux-tu SVP me donner rapidement la valeur économique de ce dossier? ».
Rapidement, ça voulait dire… moins de 30 minutes ! Parce que, dans les nombreuses entrevues qu’il allait accorder tout l’après-midi aux médias de Québec, de Montréal et du Canada, il voulait pouvoir chiffrer – via une firme indépendante – l’impact du dommage que Maclean’s venait de causer à la réputation du Carnaval de Québec.
Tel un chef aux fourneaux, Jean Pelletier devait s’occuper de plusieurs éléments à la fois : consulter les membres du comité exécutif du Carnaval, diriger son équipe de permanents, parler à ses avocats, définir les messages, etc.
À l’intérieur du délai serré convenu, je lui ai donné quatre montants très impressionnants. Selon notre outil Mesure D (www.analysedepresse.com), la « une » du Maclean’s avait une valeur économique négative de (-235 000 $) pour le Carnaval de Québec et de (- 800 000 $) pour le gouvernement du Québec. À l’intérieur, aucun impact pour le Carnaval puisque son nom n’était même pas mentionné… alors que le dossier était particulièrement dévastateur pour le gouvernement : (- 1 200 000 $) !
Ainsi, la direction du Carnaval a été en mesure de s’appuyer sur une donnée provenant d’une firme indépendante au moment de faire valoir, auprès de la direction du Maclean’s, l’impact négatif de sa « une ». L’outil de gestion est devenu… outil de négociation !
Le phénomène du Y
Que s’est-il passé à partir de cette « une », assurément la plus vue et la plus commentée au Québec en 2010 ? C’est ce que j’appelle « phénomène du Y ».
À partir d’une même souche – LA retombée de presse – l’impact a été diamétralement différent pour les deux sujets mentionnés.
D’une part, il y a eu une véritable « montée aux barricades » pour défendre la réputation de Bonhomme : la direction du Carnaval au premier chef, de même que plusieurs élus, sans oublier la Chambre de commerce de Québec et de nombreux animateurs, journalistes, chroniqueurs et blogueurs. Tous disaient, dans leurs mots : « Touche pas à Bonhomme ! ».
D’autre part – et même si les Québécois n’ont pas apprécié être catalogués de « province corrompue » – les retombées négatives se sont multipliées durant près d’une semaine. Et personne – extérieur au dossier – n’est venu à la rescousse de la véritable cible de cette manchette : le Québec. Évidemment, dans un tel cas, ce ne sont pas les élus qui sont les mieux placés pour tenter de décoller l’étiquette « corruption » qui vient d’être accolée à une province…
Une retombée, deux valeurs économiques
Revenons aux chiffres présentés précédemment et concentrons-nous sur la « une ». Que s’est-il donc passé ?
- Bonhomme s’est fait éclabousser par une seule retombée qui lui a valu une valeur économique négative (-235 000 $). Celle-ci a été jugée très dommageable pour sa famille du Carnaval parce qu’il n’avait absolument rien à voir avec le sujet du reportage. C’est pourquoi, même s’il a une amusante voix caverneuse, bien des gens ont senti le besoin de parler en son nom…
- On ne compte plus les retombées de presse favorables envers Bonhomme à la suite de la « une » de Maclean’s, et attendez-vous qu’il soit particulièrement bien traité par les médias, ces jours-ci, à l’occasion de la 57e présentation du Carnaval…
- Le Québec (et non pas spécifiquement le gouvernement Charest) en a pris pour son rhume : la moitié d’une « une » qui lui vaut une valeur économique négative de (-800 000 $)… ce qui a engendré un dossier dévastateur à l’intérieur du Maclean’s et des dizaines de retombées négatives, tant au Québec qu’à travers le Canada…
Au-delà des dollars, comparons l’impact :
Visibilité
Bonhomme s’en serait bien passé…
… et le Québec aussi !
Verdict : nul
Notoriété
Bonhomme est encore plus connu et respecté qu’auparavant… même si ce fut contre son gré !
Mais l’État québécois a perdu des plumes…
Verdict : Bonhomme gagnant
Crédibilité
Bonhomme reste blanc comme neige…
… alors que le Québec, tout comme les autres provinces d’ailleurs, se serait bien passé du qualificatif « corrompu »…
Verdict : Bonhomme gagnant
Valeurs
Bonhomme est demeuré synonyme d’authenticité et d’honnêteté…
… mais le Québec, lui ?
Verdict : Bonhomme gagnant
Qu’en pensez-vous ?
Sur ce, Bon Carnaval, cher Bonhomme !