Campagne électorale

Le débat des chefs: un périlleux exercice de communication!

Par Pierre Gince, PRP, ARP, FSCRP   |   7 août 2015

 

Lundi, l’équipe de Mesure Média vous prédisait une campagne sous le signe du changement. Tout y passe, même la formule des traditionnels débats des chefs!

Après de houleuses négociations à propos du calendrier et de la participation de chacun, les chefs ont donné le ton à la campagne, jeudi soir, lors du premier débat organisé par Maclean’s.

Regardons comment chaque chef présent au débat s’est débrouillé pour diffuser son message.

 

Stephen Harper

Un habitué des débats des chefs – il en était à son 15e – M. Harper n’a pas été flamboyant, mais a su demeurer impassible face à un barrage d’attaques en règle. Il a démontré sa bonne maîtrise des dossiers et a été en mesure de faire bifurquer la discussion pour l’amener dans une direction où il est à l’aise de répondre.

Du côté conservateur, on doit tout de même être déçu de ne pas avoir pu attaquer en règle les deux principaux adversaires; il s’agit là d’une belle occasion ratée.

 

Moment fort : grand gagnant du segment sur la réforme démocratique, alors que MM. Trudeau et Mulcair débattent à savoir qui aime plus le Canada. Pendant ce temps, le premier ministre n’a pas à rendre de compte sur le scandale du Sénat.

Moment à oublier : a dû répondre aux questions d’un journaliste chevronné et de trois chefs qui veulent son poste!

Moment digne de mention : sans surprise, M. Harper domine le segment sur les affaires étrangères et la sécurité nationale.

Note : 7,5 / 10

 

Thomas Mulcair

Les attentes étaient élevées pour le chef néo-démocrate, lui qui a habitué les Canadiens à une performance digne de Perry Mason lors de la période de questions à la Chambre des communes !

Il a paru nerveux durant les premiers échanges, comme si le côté incisif d’Angry Tom s’était écroulé au regard des sondages qui placent son parti en tête. Pourtant, c’est exactement ce qui a fait sa popularité à Ottawa. Toutefois, si son pari était de démontrer qu’il pouvait avoir le calme et l’étoffe d’un premier ministre, le pari est réussi.

D’un point de vue de la communication avec les téléspectateurs, M. Mulcair paraissait nettement plus à l’aise lorsque la conversation était engagée que lorsqu’il regardait directement la caméra.

 

Moment fort : auteur de la première attaque mordante du débat «Frankly Mr. Harper, we can’t afford another four years of you. »

Moment à oublier : aucune mention des sénateurs Duffy, Wallin et Brazeau dans le segment sur la réforme démocratique.

Moment digne de mention : forcer Stephen Harper à admettre que la situation économique ne va pas bien et que le Canada approche une récession technique.

Note : 7 / 10

 

Justin Trudeau

Le chef qui générait le moins d’attentes, Justin Trudeau a un peu tiré sur tout ce qui bougeait lors du débat. Comme pour cacher son inexpérience dans telle situation, le chef libéral a adopté un ton très insistant, interrompant souvent ses adversaires, répétant des lignes apprises par cœur. Son message est toutefois demeuré très vague, rappelant ad nauseam que son plan était meilleur que les autres.

Ses mois de pratique semblent tout de même avoir porté leurs fruits, puisqu’il a paru beaucoup moins dépaysé que lors des débats à la Chambre des communes. Sa performance ne lui permettra peut-être pas de gagner des appuis chez les conservateurs ou les néo-démocrates hésitants, mais il a certainement été en mesure de consolider ses appuis chez sa base. Son entourage peut donc dire : mission « presque » accomplie.

 

Moment fort : il a surpassé indubitablement les faibles attentes!

Moment à oublier : son discours de fin, un long message qui ne veut rien dire du tout.

Moment digne de mention : « 9. » En réponse à Thomas Mulcair concernant le chiffre requis lors d’un éventuel référendum québécois.

Note : 7,5 / 10

 

Elizabeth May

Elizabeth May s’en est tenue à des attaques bien livrées, mais surtout, bien préparées !

La chef du Parti vert a parfois été trop patiente avant d’intervenir, mais le respect dont elle a fait preuve lors de ses prises de parole n’est pas sans rappeler le flegme dont avait fait preuve Françoise David lors du débat des chefs provincial de 2012. En accordant des réponses en lien avec les thèmes abordés par le modérateur Paul Wells, Mme May est sans aucun doute la chef qui s’est le mieux illustrée jeudi soir.

 

Moment fort : elle a remporté le segment sur l’environnement et les ressources naturelles.

Moment à oublier : Après plusieurs années à la tête des Verts, Mme May doit encore rappeler que les Verts sont un parti de plus d’un seul enjeu, ce qui peut paraître comme un constat d’échec de sa chefferie.

Moment digne de mention : seule chef intéressée à répondre directement aux questions posées, et non uniquement réciter des lignes apprises.

Note : 8 / 10

 

Et vous, comment évaluez-vous la performance des quatre chefs? À vous la parole!