Analyse de presse

Réputation de Northvolt : trois constats

Par Pierre Gince, PRP, ARP, FSCRP   |   17 octobre 2024

Si vous ne travaillez pas chez Northvolt, ce blogue s’adresse à vous pour au moins quatre raisons :

  • vous n’êtes pas au cœur de la gestion de cette crise de réputation;
  • vous êtes responsable – directement ou indirectement – de la réputation de votre organisation;
  • vous suivez la « saga de réputation » de Northvolt dans les médias traditionnels et numériques, et les réseaux sociaux, et ce, depuis l’annonce de son implantation au Québec;
  • vous êtes toujours à la recherche de leçons et de trucs pour optimiser votre gestion de réputation. Ça tombe bien, le « cas Northvolt » est riche d’enseignements !

Un déficit de réputation, jour après jour

Il est possible d’analyser la situation de Northvolt sous de nombreux angles. Mais, mettons de côté ses difficultés économiques, et attardons-nous à un aspect incontournable – sa réputation – puisqu’il s’agit de son bien intangible le plus important. Concentrons-nous sur sa situation au Québec.

Débutons par une question : est-ce que votre organisation est à l’abri d’un déficit de réputation ? Poser la question, c’est y répondre.

Même si le déficit de réputation de Northvolt est d’une ampleur exceptionnelle, et loin de votre réalité, vous auriez tout intérêt à vous y attarder. Puisque les sources de ce déficit pourraient vous frapper, vous aussi, de plein fouet…

 

Au moins trois raisons principales ont contribué au « cas Northvolt » :

1. Une médiatisation exceptionnelle, considérable, et… rarement souhaitée

Au cours des dernières décennies, un dicton était très populaire : « Parlez de nous en bien ou en mal, mais parlez de nous ! ». C’était un signe de prospérité et de succès. Les choses ont bien changé…

Depuis l’annonce de son arrivée en sol québécois, il y a à peine plus d’un an, Northvolt a privilégié davantage la qualité que la quantité. Ses opérations de rayonnement médiatique ont en effet semblé réfléchies et ciblées : dire quoi à qui, quand et, surtout, pourquoi ?

Mais, l’accès aux médias traditionnels et numériques, ainsi qu’aux réseaux sociaux, n’était pas exclusif à l’équipe de Northvolt. Les gouvernements du Québec et du Canada, les municipalités de Saint-Basile-le-Grand et de McMasterville, et de nombreux opposants ont sauté dans la mêlée – chacun se préoccupant de son positionnement et de ses intérêts.

Résultat depuis un an : un bruit médiatique gigantesque, teinté de doute et de négativisme.

Plus de 20 000 mentions de Northvolt en un an dans les médias québécois ! Plusieurs enjeux ont été abordés, la plupart négatifs pour l’entreprise. Source du contenu du visuel : Cision

 

2. « On va vous arranger ça ! »

Rappelez-vous l’arrivée avec éclat de Northvolt en Montérégie. Les premiers ministres François Legault et Justin Trudeau étaient excités par cet investissement de sept milliards $ – le plus important du secteur privé de l’histoire du Québec.

La conférence de presse annonçant l’implantation était à peine terminée qu’un message a été martelé, martelé et encore martelé, notamment par l’entreprise et le ministre Pierre Fitzgibbon : « Il faut faire vite, vite, vite ! ».

La lune de miel fut de courte durée… puisque, graduellement, une notion de doute s’est installée : est-ce que les règles liées à l’environnement seront scrupuleusement respectées par Northvolt, ou… redessinées sur mesure par le gouvernement Legault et son « super ministre » ?

Ce doute a fait en sorte que la couverture médiatique de Northvolt a été passablement teintée par ce que disait, faisait, ne disait pas et ne faisait pas le gouvernement du Québec.

Deux ministres – l’un à Ottawa, l’autre à Québec – ont été les principaux porte-parole de leur gouvernement respectif dans le dossier Northvolt. M. Fitzgibbon a quitté la vie politique le 3 septembre dernier. Source du contenu du visuel : Cision

Pour un certain nombre de fonctionnaires en environnement frustrés par la situation, c’était plus que des doutes. Il y a des faits qui les irritaient. Rouspéter contre le gouvernement Legault autour de la machine à café n’a pas suffi. Des notes ont été rédigées – les écrits laissent des traces, c’est connu – et des discussions sur Teams ont eu lieu.

 

3. L’acceptabilité sociale s’est imposée

Jusqu’à aujourd’hui, la notion d’acceptabilité sociale a dominé.

Population du Québec : 1, Northvolt : 0.

Différents groupes de pression de tonalités différentes – dont le Comité action citoyenne projet Northvolt, Rage climatique et Greenpeace – se sont exprimés régulièrement sur les réseaux sociaux et dans les médias traditionnels et numériques.

Très souvent, leurs interventions ont nourri les journalistes, faisant l’objet d’une couverture médiatique importante. Et, le doute entretenu à l’égard de Northvolt vient grandement de là : l’écart entre l’intérêt public – qui nécessite du temps pour une étude du B.A.P.E., notamment – et une urgence d’agir.

De nos jours, « Faire vite, vite, vite ! » entre en collision avec la notion grandissante d’acceptabilité sociale.

Page d’accueil du Comité action citoyenne sur Facebook. Source du visuel : Comité action citoyenne

Quoi faire lorsque l’on vit un déficit de réputation ?

De plus en plus, nos clients osent faire mesurer leur déficit de réputation. Ça fait mal… et ça demande une bonne dose d’humilité…

Mais, affronter un déficit de réputation de face, comme un vent puissant, permet de le résoudre de la bonne façon, et plus rapidement.

L’ère du « pifomètre » est terminée. C’est avec des données quantitatives et qualitatives, de même qu’une expertise externe, que les stratèges en affaires publiques parviennent à redresser graduellement des situations de déficit de réputation.